Historique

JEAN-CLAUDE GUEZENNEC

LE FONDATEUR D’ARCHIMÈDE-FILMS

JEAN CLAUDE GUÉZENNEC
(1928-2021)

Jean-Claude Guézennec est une figure incontournable de l’éducation et du cinéma en Haute-Normandie. Né avec une passion ardente pour le septième art, il aurait souhaité devenir réalisateur, mais choisit finalement une voie plus sûre, celle de l’enseignement. Après avoir obtenu l’agrégation de lettres classiques, il entame sa carrière pendant la guerre d’Algérie, où il est envoyé enseigner à Blida. C’est là qu’il fait ses premiers pas dans l’enseignement avant d’être nommé en 1957 au lycée Pierre Corneille de Rouen. Cet établissement deviendra le théâtre de ses plus grandes initiatives pédagogiques.

Jean-Claude Guézennec n’est pas un professeur comme les autres. S’il commence par enseigner la rédaction à des classes de 6e et de 4e, il décide rapidement de dynamiser son approche en lançant ses élèves dans l’écriture de scénarios. Pour lui, l’écriture ne devait pas être ennuyeuse ; elle devait être un tremplin vers la création. C’est ainsi que, dès 1958, il permet à ses élèves de tourner leur premier court-métrage, Le Fugitif, un film de 30 minutes qui recevra un grand prix lors d’un festival. Fort de ce succès, il ne s’arrête pas là. En compagnie de son collègue Henri Sergent, professeur d’arts plastiques, il fonde l’atelier de réalisation « Archimède Films », un projet novateur destiné à initier les jeunes aux techniques du cinéma.

Sous sa direction, « Archimède Films » devient un véritable incubateur de talents. Cet atelier deviendra officiellement une association le 2 mars 1970. Pendant une cinquantaine d’années, Jean-Claude Guézennec forme ses élèves à toutes les étapes de la création cinématographique, les accompagnant dans la réalisation de nombreux films. Archimède-Films ne tarde pas à acquérir une réputation qui dépasse largement les murs du lycée. Ce professeur visionnaire a non seulement fait naître des vocations, mais a aussi inscrit le cinéma comme une discipline à part entière dans le cursus scolaire.

Le travail de Jean-Claude Guézennec ne s’arrête pas là. Il est également à l’origine de la création du bac Cinéma ainsi que du BTS audiovisuel au lycée Corneille, offrant ainsi une formation professionnelle aux jeunes désireux de se lancer dans les métiers de l’image. En 1993, lorsqu’il prend sa retraite, certains de ses anciens élèves, devenus des professionnels du cinéma, lui rendent hommage en tournant avec lui le film de sa vie, Moi, Pierre C.

Toujours en quête de nouveaux projets, Jean-Claude Guézennec a également fondé l’Institut Régional de l’Image et du Son (IRIS), qui deviendra en 2000 le Pôle Image de Haute-Normandie, puis l’agence Normandie Images en 2015. Grâce à lui, la région de Rouen s’est affirmée comme un pôle incontournable pour la formation et la production dans le domaine de l’audiovisuel.

Avec une carrière aussi prolifique, Jean-Claude Guézennec laisse un héritage culturel et éducatif immense. Il a contribué à former plusieurs générations de cinéastes et à ancrer durablement le cinéma dans l’enseignement. Sa passion, son engagement et son amour pour le septième art continuent d’inspirer et de rayonner, bien au-delà des frontières de la Normandie.

Il s’est éteint le 23 juillet 2021 à l’âge de 93 ans.

CHRONOLOGIE

La classe de 4ème B3 du Lycée Corneille fonde un journal : » Archimède » puis elle écrit et réalise un film, Le Fugitif, une fiction de 30 minutes, tourné en 16mm et crée, pour le produire, « Archimède-Films ». Ce film sera présenté en public le jeudi 12 Mars 1959, à la Salle Ste Croix des Pelletiers, et obtiendra la même année, un prix spécial du jury au Concours National du Cinéma d’Amateurs.

Un groupe d’élèves, anciens de 4ème B3, continue l’activité de création cinématographique, au sein d’un Club qui porte encore le nom d’Archimède-Films, affilié à la Coopérative scolaire du Lycée, l’U.G.A.C.S. Plusieurs autres films de court métrage sont ainsi réalisés tandis que d’autres films sont réalisés en 8mm avec la participation d’un prof de dessin, Henri Sergent. Une collaboration s’instaure très vite avec le Ciné-Club animé par un professeur de Lettres, Jean Lemarchand et un élève de Terminale qui fera ensuite l’IDHEC, Didier Beaudet (il deviendra producteur et directeur de Dynascope, à Paris).

Le Club devient l’Atelier de Création Cinématographique du Lycée Corneille, toujours sous le même nom. Une véritable association déclarée à la Préfecture, est créée. Elle officialise la structure, lui garantit une certaine autonomie et lui permet d’intervenir désormais hors du lycée. La même année, pour accroître le rayonnement de leur action, cette fois auprès des adultes, les animateurs d’Archimède suscitent la création d’une association régionale, le Centre Normand d’Etudes Cinématographiques. (C.N.E.C.)

Archimède-Films, est reconnu par l’Inspection Académique, et reçoit la mission de gérer un atelier départemental, lié à l’OCCE – Office Central de la Coopération à l’Ecole – ce qui lui permet d’accueillir dans ses locaux de Corneille, des jeunes d’autres lycées. L’association est également agréée par le Ministère de la Jeunesse et des Sports, et établit des liens de coopération avec les Foyers Ruraux de la Seine-Maritime pour lesquels elle organise des stages d’initiation à la création cinématographique. En Février de cette même année, Archimède et le CNEC organisent les premières Rencontres Nationales du Jeune Cinéma Non Professionnel. Cette manifestation qui conteste l’intérêt des Festivals officiels et le cinéma dit d’amateur en général, connaît un succès triomphal (600 participants). Il y a aura 18 Rencontres Nationales. (La dernière a eu lieu en 1983)

Quelques élèves, membres d’Archimède-Films, décident de devenir professionnels. Ils ouvrent au Club des perspectives nouvelles. Deux d’entre eux réussissent très vite: l’un par le biais de l’ECPA, François Chenivesse (Image) – l’autre par la voie des grandes écoles : Jean-Jacques Tillaux (Son). Avec leur concours, Archimède réalise un premier film de 52 minutes, en son synchrone, avec du matériel professionnel, L’Ecole et la Vie, commandité par un mouvement pédagogique, l’OCCE, dont 30 copies sont diffusées en France et en Italie. Désormais un certain nombre de jeunes viennent chaque année à Archimède pour tester leurs aptitudes et se préparer à entrer dans la profession.

Le Centre National du Cinéma (Ministère de la Culture) confie au CNEC et à Archimède l’organisation d’un Colloque National sur les Ateliers de Création Filmique. (23-25 Avril). Succès total !

Vu l’importance et la réputation de l’Atelier, une première expérience d’intégration du cinéma dans l’enseignement (classe de 2è et de 1ère) est autorisée au Lycée Corneille. On crée pour cela le G.E.F. (Groupe d’Etudes Filmiques) étroitement lié à Archimède Films qui fournit locaux et matériel. Cette expérience pèsera lourd dans les décisions prises par Jack Lang en 83, et fournira les premières bases de cet enseignement nouveau.

Le CNEC ne pouvant plus répondre à la demande sans cesse croissante du public, on crée avec l’appui du Préfet de Région, une structure permanente professionnelle, l’IRIS : l’Institut Régional de l’Image et du Son de Haute-Normandie.1983. Création par le Ministère de l’Education Nationale, d’un enseignement intégré du cinéma, dans quelques lycées, à titre expérimental. Le Lycée Corneille devient ainsi l’un des tout premiers lycées à proposer à 15 élèves par niveau une option baptisée : “Cinéma / Audiovisuel”. La réputation d’Archimède est telle que son animateur est appelé au Ministère pour siéger dans les commissions spécialisées, chargées d’organiser cet enseignement nouveau. C’est ainsi qu’ Archimède… a été amené à imaginer des programmes, et des épreuves pour un Bac nouveau… (Qui l’eût cru en 1958 ?)

Premier Bac Option Cinéma de l’Histoire !

Ouverture au Lycée Corneille d’un B.T.S. Audiovisuel, avec modules de préparation aux grandes écoles de cinéma ( Louis Lumière et FEMIS ), le seul lycée de France à offrir cet enseignement combiné (plus d’un millier de candidats chaque année pour peu de places!).

Archimède qui a accompli sa mission à l’intérieur du Lycée, s’en voit… pour ainsi dire exilé, par des administrateurs peu soucieux de la Tradition. Mais il trouve refuge à l’I.R.I.S. où il reprend vie. Il y transfère son siège social. L’Atelier s’adresse dès lors en priorité aux jeunes qui envisagent d’entrer à la section Cinéma de Corneille – ou qui n’ont pu y entrer – ou qui, étant à Corneille, souhaitent réaliser davantage de films en cinéma dans un certain esprit. Ainsi chaque année, sans aucune publicité, une quinzaine de jeunes de 14 à 18 ans continuent à réaliser des films 16 mm…

Sortie au Multiplexe GAUMONT d’un programme d’une heure 40, baptisé » Corneille 2000 » qui comprend des courts métrages réalisés par des anciens du Lycée devenus professionnels, et » Moi, Pierre C. Elève du Collège de Bourbon » , film 35mm réalisé par Jean-Claude Guezennec, sous le label d’Archimède, avec la collaboration d’un grand nombre d’anciens devenus des techniciens professionnels ( Chefs opérateurs image, Ingénieurs du Son, Assistants réalisateurs, scripte, etc.) – ou des comédiens (Yves Pignot, Rufus, Mario Pecqueur etc ) – Programmation commerciale d’une semaine… un bel exploit ! Ce film remportera la même année le prix de la qualité du Ministère de la Culture.

L’IRIS à la demande pressante de la Région, consent à disparaître pour donner naissance à une nouvelle structure, plus institutionnelle, plus riche de moyens, mais moins indépendante, puisque placée de fait sous tutelle : C’est le Pôle Image de Haute- Normandie. Son premier président, élu, est un vieil ami d’Archimède : Jean-Paul Cayeux. Archimède-Films garde son autonomie, et continue ses activités. Ses jeunes adhérents sont plus offensifs que jamais…

Au cours des rencontres mensuelles, Archimède accueille entre autres : Bruno CHICHE, réalisateur de Barnie et ses petites contrariétés, Rémi CHEVRIN, Chef Opérateur, à l’occasion de la sortie de Va, Vis et Deviens, Claude DUTY, réalisateur de Filles perdues,cheveux gras, Michèle TOURNIER, réalisatrice de télévision, Michel BRETHEZ, Chef Opérateur du Son ( l’ingénieur du son, entre autres, de Serge Gainsbourg).
 
Plusieurs films sont réalisés : Fallen Interlude de Benoît PERGENT , La vieille Dame et l’Enfant d’Antoine DUBOS, 1,4 Kg de Mathieu CAUVIN, Le fait du Jour de Marianne LEROUX et Coma Noir d’Alban SANNIER.

Pour répondre à certaines demandes, un autre axe de travail apparaît, qui s’adresse aux membres plus âgés d’Archimède, ceux qui sont au seuil de la profession et disposent de temps libre : la réalisation de films institutionnels, à implication sociale ou culturelle.
 
Ainsi Archimède travaille durant 9 mois avec le CFA Agricole d’Yvetot et la Brigade de Prévention de la Délinquance des Jeunes (BPDJ) pour réaliser 6 films d’intervention sociale tout en initiant à l’audiovisuel une trentaine de jeunes adolescents.
Puis les interventions se succèdent avec le Foyer des Jeunes Travailleurs de Vernon, le Centre Social de la Madeleine d’Evreux, Le PIJ de St André de l’Eure… C’est la suite logique du stage organisé en 2004 à Gaillon.
Enfin la Direction Régionale de la Jeunesse et des Sports confie à Archimède la réalisation de neuf films de 3 minutes sur le thème  » Sport et intégration  » en vue d’un Colloque présidé, en décembre, par Jean-François LAMOUR, le Ministre…

Archimède-Films fête ses 50 ans… et dignement, notamment avec la réalisation d’un court métrage en cinéma 35 mm : Baby Boom sur un scénario d’Archibald MARTIN, avec Damien MORISOT comme Chef Opérateur image et Pierre ANDRE, comme ingénieur du son.
 
Tout un week-end est consacré à la célébration proprement dite de cet anniversaire. Un programme spécial est à l’affiche de l’UGC Saint-Sever, pour une semaine, avec plusieurs courts métrages réalisés par des anciens, et « Moi, Pierre C. » qui reste le film le plus abouti de ces 50 ans, grâce à la coopération de très nombreux anciens devenus professionnels. Une soirée solennelle a lieu bien sûr, sous le patronage du Conseil Général et du Conseil Régional.

C’est le commencement en trésorerie de Annie DESHAYES, qui depuis cette année, assure une place centrale dans les activités de l’association.
 
D’autre part, la plupart des films anciens tournés en 16mm ont été numérisés par le Pôle Image, constituant une collection fort intéressante de DVD. Un appel avait été lancé pour que les jeunes élèves de 4ème fondateurs d’Archimède, reviennent au lycée 50 ans après cette fondation et une bonne moitié de la classe (la 4ème B3 !) s’est en effet retrouvée avec beaucoup d’émotion, pour revoir leur film, le Fugitif, dans la salle de cinéma aux traditionnels fauteuils rouges…
 
Enfin, un album a été publié, relatant sur papier glacé… l’aventure d’Archimède à travers textes et photos, beaucoup d’anciens ayant accepté d’écrire quelques lignes de souvenirs, sur des tournages ou des évènements qui ont marqué leur Jeunesse.
 

L’Atelier Archimède s’est développé en devenant régional et en multipliant les partenariats avec des festivals et des institutions éducatives. Ils ont réalisé de nombreux films éducatifs, sociaux et culturels, tout en formant de jeunes techniciens. Des projets notables incluent des films sur les dangers d’Internet, la violence, et des documentaires historiques. Leur 50ème anniversaire a été marqué par des événements spéciaux et la numérisation d’anciens films. L’Atelier a aussi diversifié ses activités en produisant des films institutionnels et en devenant un organisme de formation reconnu. À la mort du fondateur de l’association Jean-Claude Guezennec, c’est Laure Jouvin qui reprit les rênes de l’association pendant 2 ans jusqu’à l’arrivée de la nouvelle présidence.